Trop de rigidité?

Comme à tous les printemps, on voit passer des annonces mentionnant plus de rigidité sur de nouveaux cadres par rapport aux anciens. 10% ici, 14% là. Plus efficace, plus rapide on nous dit. Intuitivement, c’est logique, alors on embarque.

Mais est-ce le cas? Est-ce que la rigidité latérale d’un cadre de vélo est corrélée avec plus de rapidité? Une discussion avec Jan Heine, James Huang et Damon Rinard sur le podcast de l’excellent site cyclingtips.com nous a inspiré cet article afin de démystifier cette croyance.

Jan Heine c’est posé la question il y a quelques années et a ensuite réalisé quelques expériences afin d’en savoir plus sur le sujet. Le test ultime fut un test à double insu avec des vélos identiques en tout point, sauf pour leur rigidité. Ni l’administrateur du test, ni les cyclistes ne savaient sur quel vélo ils roulaient. Le résultat? Le cycliste sur le vélo plus flexible générais plus de watts! 12% de plus! Subjectivement, les cyclistes du test affirmaient se sentir capable de pousser plus fort sur le vélo plus flexible à chaque fois. On voit dans la charte suivante les effort d’un des cyclistes sur le vélo rigide (#1) et le vélo flexible (#2):

Puissances moyennes sur chaque vélo

Comment se peut-il qu’un cadre plus flexible permette à un athlète de produire plus de watts? La façon de comprendre ce qui se passe est plutôt d’imaginer quelqu’un sauter sur un plancher en béton vs sur un trampoline. Le béton est certes plus rigide, mais il ne permet pas d’amplifier le travail de l’athlète comme le fait le trampoline.

Le réal facteur important ici est le coefficient de restitution du cadre. En bref, lorsqu’on applique une force simulant le coup de pédale sur un cadre, et qu’on retire cette force, le cadre retrouve sa forme initiale à chaque fois. Dans le cas des vélos modernes, celui-ci se trouve tellement proche des 100% qu’il est très difficile d’arriver à le mesurer. Il n’y a donc pas de perte d’énergie dans le système.

Il est aussi intéressant de constater que le modèle mathématique le plus utilisé et respecté dans le domaine du vélo ( Validation of a mathematical model for road cycling, Martin et al. 1998 ) n’inclus pas de paramètre pour la rigidité ou le coefficient de restitution. Ce sont des variables complètement indépendantes.

Alors, armé de ces nouvelles connaissances, on fait quoi? Essentiellement, c’est une question de bien arrimer les caractéristiques d’un vélo au cycliste. Selon le gabarit, la puissance du cycliste et son style de pédalage, les recommendations vont inévitablement changer. C’est d’autant plus important de faire plusieurs essais routier avant de prendre une décision sur un vélo.